Le roi Abdallah de Jordanie a posté sur Facebook un article sur « certains phénomènes sociaux alarmants » ayant cours sur les réseaux sociaux.
« Aujourd’hui, ces plateformes, telles que Facebook, Twitter et autres, nous offrent à tous une voix et une occasion sans précédent de communiquer, d’exprimer ce que nous avons à l’esprit et d’échanger des points de vue, de nous concentrer sur des questions décisives et humaines, de jeter la lumière sur les questions cruciales et d’en débattre, plus encore d’en tenir compte si le débat est constructif », a écrit le souverain jordanien.
Et d’ajouter : « Ces technologies et outils sont devenus de la plus haute importance pour nous tous, et pour moi aussi, c’est à travers eux que j’entends les idées et les opinions des citoyens sans filtration aucune des informations, des opinions, ni obstacles ou restrictions… ».
« Cependant, ces derniers temps j’ai commencé à voir sur les réseaux sociaux des tentatives visant la perturbation » du socle social, « c’est ce qui m’a amené à m’adresser à vous (Jordaniens) aujourd’hui », a-t-il poursuivi avant d’affirmer : « Lorsque nous surfons sur ces plateformes, nous rencontrons parfois beaucoup d’agressivité, de diffamation et de haine, au point que ces plateformes sont devenues presque un lieu de dénigrement et d’insultes, pleines de commentaires malicieux et de désinformation, souvent dénuées de pudeur ou de la bienséance comme règle de la communication et de l’écriture, sans responsabilité morale ou sociale ni respect des lois qui ont été élaborées pour dissuader et réprimer tout malfaisant ».
« Ce que nous avons vécu récemment à la suite de l’incident de la mer Morte, qui nous a tous affectés, et les commentaires qui s’en sont suivis de la part de certains, confirment ce basculement et nous rappellent que l’utilisation des réseaux sociaux nous dicte d’être à la hauteur de la responsabilité dans nos réactions sur les événements survenus dans le pays. Et je me trouve ici obligé de m’arrêter sur certaines de ces réactions. Car nous devons faire la différence entre les opinions qui ont critiqué les prestations en exigeant la détermination des responsabilités, et cela découle du devoir et c’est souhaité, et une minorité de ceux qui ont mal réagi par l’insulte et le cynisme. En effet, nos enfants et nos filles que nous avons perdus nous placent devant de nombreuses questions sur leur (les dénigreurs) relation avec la société et les objectifs derrière cette négativité qui leur a fait perdre malheureusement leur humanité. Nous devons nous demander sur qui se cache derrière ces points de vue étrangers aux valeurs de notre société », a souligné le roi.
Certes, l’incident de la mer Morte exige de relever les lacunes et les insuffisances, de demander des comptes à tous ceux qui en sont responsables et d’en tirer des enseignements pour éviter de tels incidents douloureux à l’avenir, et aussi un certain regard quant à l’ampleur et à la nature des réactions sur les réseaux sociaux.
« Ce n’est un secret pour aucune personne qui suit les discussions sur Internet que les rumeurs et les fausses informations sont le carburant avec lequel ceux qui ont des agendas nourrissent leurs fans pour entraîner l’opinion publique ou régler des comptes personnels et politiques », a-t-il encore relevé.
+ Quel est l’avenir de notre société si.. ? +
Et de souligner : « Entre les mensonges, les slogans creux et les pseudo-héroïsmes se propagent, souvent, le négativisme et le sentiment de frustration. Le lecteur reste confus entre vérité et rumeur. Et un climat de suspicion, de confusion et de pessimisme règne sur la société à cause des rumeurs dont la seule source de sa crédibilité est la vitesse de sa propagation, de sorte que le monde virtuel ne reflète plus la véritable image de nos valeurs, de notre société et la réalité dans laquelle nous vivons chaque jour ».
« La rumeur peut faire le tour du monde avant que la vérité n’émerge. Ceci est corroboré par une étude du Massachusetts Institute of Technology selon laquelle les fausses informations lancées sur Twitter, par exemple, ont une capacité de prorogation dépassant de 70% les vraies informations », a affirmé le roi Abdellah II avant d’évoquer les rumeurs et mensonges qui ont couru sur sa propre personne.
« Je pense ici à la vague de rumeurs et de mensonges qui se sont multipliés pendant mes vacances habituelles. Même après mon retour et la reprise de mes activités locales, la question demeurait : où est le roi ?! Certains continuent à douter de ma présence alors même que je suis devant eux. L’illusion des écrans est-elle devenue plus forte que la réalité chez certains » ?, s’est-il encore interrogé.
Et de poursuivre : « Je vais me trouver parfois obligé de parler de cette question, et nous devons tous ne pas hésiter à confronter ceux qui se cachent derrière leurs écrans et leurs mensonges avec la vérité. Toute personne victime de diffamations peut avoir recours à la justice pour lui rendre justice. Nous sommes un Etat de droit et d’institutions ».
Le roi de Jordanie a, en outre, rappelé que ce phénomène est devenu un fléau mondial au point que de « nombreux pays s’orientent vers une législation visant à contrecarrer la propagation d’informations fausses et trompeuses ».
Soulignant la nécessité de renforcer, à cet égard, la législation de son pays, mais de manière à préserver, d’un côté, la liberté d’expression et, de l’autre, à garantir la stabilité de la Jordanie, le souverain jordanien a relevé, par ailleurs, la responsabilité des sociétés propriétaires des réseaux sociaux dont le rôle se doit aussi de combattre l’usage négatif de leurs plateformes.
« Mais le plus important, c’est notre responsabilité en tant qu’individus et en tant que sociétés de ne pas être seulement des réceptifs passifs, mais de réfléchir à ce que nous lisons et croyons et de réfléchir à ce que nous partageons avec les autres. Il faut faire appel à la logique et à la raison dans l’évaluation des nouvelles et des informations », a-t-il également souligné.
« Nous devons nous demander : qu’arrivera-t-il si nous ne sommes pas responsables et prudents dans nos interactions sur les plateformes ? Quel est l’avenir de notre société si nous abandonnons la rationalité et la logique et si nous répandons des rumeurs au détriment de la vérité ? Si notre discours est basé sur les mensonges et les rumeurs ?… Si les citoyens ne disposent pas de faits et d’informations fiables, comment peuvent-ils prendre des décisions éclairées et participer à un dialogue national responsable sur des questions décisives ? », a-t-il conclu.