Par Ali Bouzerda
Dans son traité politique du XVIe siècle, Nicolas Machiavel écrivait : « En politique, le choix est rarement entre le bien et le mal, mais entre le pire et le moindre mal ». Autrement dit, en période de crise, il faut faire face à la réalité et adopter une approche pragmatique.
Cette maxime semble plus pertinente que jamais dans le contexte actuel du Maroc, où le ministère de l’Agriculture a récemment révélé que « l’élevage marocain subit de plein fouet les conséquences de la sécheresse à répétition. Le dernier recensement indique une baisse de 38 % du cheptel national d’ovins et de caprins depuis 2016, entraînant une diminution de la production de viande et un déséquilibre du marché ».
Face à cette situation préoccupante, le gouvernement a adopté plusieurs mesures d’urgence : suspension des droits d’importation sur le bétail et la viande rouge, importation massive de vaches, moutons et viande rouge afin de stabiliser les prix, et rééquilibrage progressif des marchés avec une légère baisse des prix de la viande bovine prévue pour 2025.
Malgré ces efforts, « la pression sur le cheptel national reste forte », selon les autorités compétentes. Ainsi, l’État se trouve confronté à un dilemme crucial : comment concilier les impératifs de la tradition islamique avec les contraintes socio-économiques croissantes ?
Bien évidemment, l’Aïd al-Adha est une fête profondément ancrée dans la culture marocaine. Il serait impensable de convaincre la population de renoncer à ce rituel, même si le prix du mouton a plus que triplé ces dernières années, atteignant des niveaux inaccessibles pour une grande partie de la population.
Que faire ?
D’abord, il convient de rendre à César ce qui est à César. Face à cette situation dramatique, le gouvernement a pris plusieurs mesures d’urgence, à savoir :
1. La suspension des droits d’importation sur le bétail et la viande rouge.
2. L’importation massive de vaches, moutons et viande rouge pour stabiliser les prix.
3. Le rééquilibrage progressif des marchés, avec une baisse modérée des prix de la viande bovine prévue pour 2025.
Cependant, malgré ces mesures, « la pression sur le cheptel national reste forte », comme l’affirme le ministère de l’Agriculture.
Alors, la question se pose : ne serait-il pas judicieux de suspendre la « fête du mouton » afin de permettre au cheptel de se régénérer et de retrouver son équilibre ? Une telle mesure permettrait de préserver le cheptel et la tradition pour les années à venir.
Dans ce contexte si difficile, il est important de rappeler qu’en 1981, le Maroc avait suspendu l’Aïd al-Adha en raison d’une sécheresse sévère ayant gravement affecté le cheptel et l’agriculture. Cette décision avait été prise par les autorités pour préserver les ressources en bétail et éviter une crise alimentaire.
Ce n’était d’ailleurs pas la première fois : le Maroc avait déjà pris une mesure similaire en 1963, et ce, quelques années après l’Indépendance, dans un contexte de crise agricole.
Aujourd’hui, comme alors, l’avenir du cheptel et de l’agriculture en général dépend des choix que nous ferons. Une réponse rapide et adaptée est essentielle pour garantir la résilience de notre secteur face aux défis climatiques à venir. La réflexion est urgente et doit s’articuler autour de l’équilibre entre la préservation de nos traditions et les impératifs de durabilité socio-économique.
N/B: au nom de cette « sacrée » tradition, le Maroc a sacrifié près de 6 millions d’ovins en 2024, dont presque la quasi totalité des béliers aux cornes fièrement dressées et acérées…
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