Par Ali Bouzerda
Au Maroc, un vent de panique souffle sur les commerçants traditionnels et ceux du secteur informel, confrontés à une conjoncture difficile marquée par plusieurs défis. Entre la hausse des prix, la concurrence croissante des grandes surfaces, du commerce en ligne, et les nouvelles réglementations fiscales, ces acteurs économiques se retrouvent sous pression en cette fin d’année 2024.
Dans le secteur informel, qui brasse « des milliards de dirhams » (un trésor d’Ali Baba) si l’on se fie aux estimations de Bank Al-Maghrib, les craintes se multiplient face aux tentatives de régularisation et à la montée des coûts, qui fragilisent leur modèle économique. Quant aux commerçants traditionnels, ils peinent à rivaliser avec les chaînes modernes et à s’adapter aux nouvelles attentes des consommateurs.
Mais le verdict est tombé et la Direction des impôts a pris sa décision comme « l’épée de Damoclès ». Une décision, qui a pris les gens de court car personne n’a vu venir le deadline du 31 décembre 2024, relatif au règlement fiscal obligatoire concernant les détenteurs d’argent liquide « thésaurisé » et sans justificatif valable.
Curieuse approche de dernière minute, qui a semé la panique à grande échelle, même au milieu des petits épargnants!
De quoi s’agit-il en fait ?
Selon des explications « terre à terre » d’un expert financier interviewé par nos collègues du site arabophone alyaoum24.com, l’un des l’objectifs de la Direction des impôts serait d’encourager les citoyens, pas tous les citoyens bien évidemment, à rompre avec la traditionnelle méthode du « bas de laine » ou de « l’argent sous le matelas » motivée en général par un souci de sécurité ou de méfiance tout simplement.
La banque est devenue le lieu sûr où les gens peuvent mettre les sommes d’argent économisées, en toute sécurité et de les fructifier, au lieu de les « thésauriser » et priver l’État d’importants flux financiers pour l’investissement et la création d’emplois, explique l’expert financier Said Ouahbi à alyaoum24.com.
À noter que selon les derniers chiffres disponibles, le taux de bancarisation au Maroc serait de l’ordre de 54% contre 100% dans les pays voisins comme l’Espagne et le Portugal.
Dans ce « clair-obscur », les premiers concernés sont les personnes qui possèdent des biens immobiliers et dont l’argent pour leurs acquisition n’a pas de source justificative légale et traçable.
Cette catégorie doit s’adresser aux services des impôts pour la régularisation de leur situation en payant les fameux 5% avant le 1er janvier 2025, sous peine de pénalités allant jusqu’à 38%.
Un véritable cauchemar car c’est une course contre la montre.
La deuxième catégorie est celle qui dispose d’argent liquide chez soi, en d’autres termes : du « cash », beaucoup de cash dépassant les 240.000 dirhams. La chose à faire dans ce cas de figure est de se diriger « les yeux fermés » à l’agence bancaire la plus proche et y déposer les économies en payant sur place 5% de la somme totale déclarée. Toutefois, « il faut bien conserver le quitus », car on ne sait jamais en cas de révision fiscale probable, avertit l’expert.
« De toute façon, il n’y aura ni poursuite ni interpellation et personne ne viendra mettre son nez dans votre compte bancaire », affirme-t-il.
Une promesse d’expert, mais monsieur et madame tout le monde ont besoin de garanties car ils sont méfiants dès leur bas-âge de trois choses : « Le Makhzen, la mer et le feu » (adage marocain).
Il est à rappeler que les gens qui ont bénéficié d’héritage ou des employés qui ont un salaire régulier justifié ne sont pas concernés par « l’épée de Damoclès » du fisc, dit-on.
In fine, plus de peur que de mal, mais le citoyen a le droit d’être informé correctement à l’avance sinon le premier réflexe, notamment chez les riches, est de se précipiter chez les bijoutiers pour l’achat d’objets en l’or car c’est le seul refuge intouchable, pensent-ils.
Reste à préciser que le Maroc est sorti de la fameuse « Liste grise » du Groupe d’Action Financière (GAFI), suite à la décision de son assemblée générale tenue à Paris du 20 au 24 février 2023.
Cette évolution positive du Maroc a été saluée par le GAFI, et dans ce sillage, il doit continuer à respecter ses engagements en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme. Ainsi, il doit poursuivre le renforcement de son dispositif en la matière afin de continuer d’attirer l’investissement étranger.
Ceci explique cela !
Article19.ma