Une jeune Française violée, son compagnon marocain blessé. C’est la triste conclusion d’une fête qui a mal tourné, organisée début novembre dans une luxueuse villa de Casablanca. À la gravité des faits vient s’ajouter la personnalité des principaux suspects, trois fils de personnalités publiques connues.
Sexe, drogue et… pouvoir :
tels sont les ingrédients de l’affaire qui défraie la chronique ces derniers jours à Casablanca. Et tout particulièrement dans le monde du business et au sein du patronat, dont plusieurs noms très connus sont aujourd’hui mêlés à des accusations de viol, violences et usage de substances illicites.
Plusieurs plaintes ont été déposées. L’une en France pour viol, par une jeune femme de nationalité française. Et deux autres au Maroc : l’une pour viol, déposée par la même plaignante, et l’autre pour coups et blessures, déposée par son petit ami – Mohamed Amine Naguib, responsable des commissions de la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM) – pour des faits qui se seraient déroulés à Casablanca le week-end du 8 au 10 novembre.
Sont impliqués dans ces affaires, chacun pour des motifs différents, trois fils de personnalités influentes du monde du business : tout d’abord, il y a Kamil Bennis, 37 ans, dont le père n’est autre qu’Ali Bennis, président de Laprophan de 2011 à son décès en 2019, et dont son oncle est l’actuel PDG de ce laboratoire pharmaceutique parmi les plus importants du royaume.
M’hammed Alj ensuite, la trentaine, fils du président de la CGEM Chakib Alj. Et enfin Saad Slaoui, lui aussi issu d’une longue lignée d’hommes d’affaires, connu pour être proche de Kamil Bennis, avec qui il est même associé dans «R.W.C.», un programme de fitness et de nutrition.
Durant le week-end en question, Mohamed Amine Naguib s’est rendu avec sa fiancée (dont on ne connaît pour l’instant que les initiales, S.F.) à une soirée dans la villa de son cousin Kamil Bennis, dans le quartier d’Anfa. Lui est issu d’une famille connue du landernau économique casablancais – sa mère est Nadia Lyoussi, PDG d’Agricolair Maghreb, et son père Abdelilah Naguib, directeur chez Batichem.
Quant à sa compagne (SF), elle est juriste de formation. Ils se seraient rencontrés quand il était étudiant en France et projetteraient, selon plusieurs témoins, de se marier.
C’est une soirée assez typique de ce qu’on pourrait qualifier de « Casa bling-bling » à laquelle cet influenceur et entrepreneur porté sur le fitness et la musculation – également très actif sur les réseaux sociaux où il se présente comme un genre d’Andrew Tate à la marocaine – a convié près d’une centaine de personnes.
Plusieurs stories ont été partagées sur Instagram et TikTok. Pourtant, ce qui devait être un moment de fête a tourné au drame pour le couple d’amoureux. Avec un récit des événements qui varie selon les sources. Les uns assurant que tout est parti d’«une dispute et une histoire de jalousie qui a mal tourné».
Selon certains proches, durant la soirée, des tensions seraient apparues entre Mohamed Amine et sa petite amie. « Cette dernière estime qu’il l’aurait délaissée pour se préoccuper d’une de ses ex », et dont il aurait été follement amoureux. « Blessée dans son amour-propre, S.F. aurait alors cherché à attirer l’attention en passant du temps avec d’autres participants, dont les trois accusés. Ce qui a évidemment dégénéré en bagarre lorsqu’il l’a retrouvée dans une chambre avec eux », assure un témoin.
Des versions divergentes
Une version qui rejoint celle de Kamil Bennis, accusé de viol mais qui, lors de son interrogatoire, aurait reconnu avoir eu un « rapport sexuel consenti » avec S.F. Mais qui est très différente de celle de la jeune femme, qui affirme quant à elle avoir subi un viol alors qu’elle était sous l’effet du GHB, une drogue utilisée pour ses propriétés sédatives.
Ce qui serait confirmé par des examens médicaux réalisés à son retour en France, dont la jeune femme aurait présenté les résultats lors de son audition devant les enquêteurs de la police marocaine ce jeudi 21 novembre.
De son côté, Mohamed Amine, qui a été entendu ce jeudi 20 novembre dans les locaux de la BNPJ à Casablanca, soutient que S.F. était fatiguée et qu’elle était allée à l’étage pour se reposer. Désireux de la rejoindre pour s’assurer que tout allait bien, il en aurait été empêché avant d’être violemment expulsé par ses hôtes, avec à la clé une altercation dont il est ressorti avec deux côtes cassées.
Tandis que la garde à vue des trois accusés – qui sont entre les mains de la BNPJ depuis mercredi 19 novembre – vient d’être prolongée de 24 heures, les spéculations vont bon train. En plus des plaignants et des accusés, de nombreux invités présents à la fête ainsi que les personnes travaillant dans la villa ont été convoqués par la police pour faire la lumière sur cette soirée.
D’ici samedi 23 novembre, à l’issue des 72 heures de garde à vue (le délai en vigueur compte tenu de la gravité des accusations), les premiers résultats seront présentés au procureur du Roi qui, très probablement, fera transférer le dossier au juge d’instruction. Ce qui signera sans doute le début d’un long feuilleton médiatico-judicaire.
En attendant, les projecteurs restent braqués sur cette affaire où subsistent des zones d’ombres, testant à la fois la résilience des institutions judiciaires marocaines ainsi que leur capacité à démêler le vrai du faux dans un contexte d’influence sociale et médiatique.
Contactés par Jeune Afrique, des proches du cercle amical de Chakib Alj assurent de leur côté que ce dernier, malgré son inquiétude naturelle de père, a « entièrement confiance dans la police et la justice marocaine, et [qu’il attend] les résultats de l’instruction ».
Dans cette affaire qui secoue le monde des affaires, son fils M’hammed, marié et père de deux enfants, est l’un des suspects interrogés à la suite de la plainte pour coups et blessures. (Jeune Afrique)
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