A travers mon analyse du Facebook marocain, je trouve chaque jour des posts critiquant les marocains et le Maroc, dont certains dégradent la valeur du Maroc en le comparant à d’autres pays, et d’autres qui dévalorisent le marocain, et sont souvent sous forme de moqueries, de dénigrements, insultants ou de jugements personnels sans aucun respect pour le pays et le citoyen.
Je vous cite à titre d’exemple ces posts suivants :
– La vraie raison pour laquelle nous sommes dans le tiers monde, c’est parce qu’il n’y a pas encore de quart mondehahaha (commentaire d’une photo d’un trottoir en cours de travaux).
– L’anniversaire de la récupération de Wadi (la vallée) al-Dhahab (l’or), nous avons récupéré la vallée mais n’avons vu aucun or.
– Aux enseignants participant au recensement de la population en septembre, vous pourrez également cueillir des olives en octobre pour 200 dirhams par jour.
– La Coupe du monde au Maroc, qu’est-ce qui te manque ô homme tout nu, la bague ô mon seigneur (ach khassak al3aryane, alkhatame amoulaye).
– Pourquoi n’enseignons-nous pas plutôt l’anglais dans les écoles, la langue de la civilisation, au lieu d’enseigner l’inutile langue amazighe ?
Je vais analyser très brièvement ce phénomène d’autodestruction comme suit :
1- Absence de l’amour du pays
Ni l’école ni les parents n’inculquent et ne développent chez l’enfant le sentiment et le sens d’appartenance à la société marocaine et qu’il est de son devoir de citoyen de servir sa société et de participer au progrès de son pays.
2- trouble de l’identité marocaine entre modernité et religiosité
Le marocain souffre lourdement de son instabilité identitaire marocaine. Nous apprenons à l’enfant qu’il doit être civilisé comme un européen, mais tout en respectant les traditions religieuses et les coutumes sociales, qui sont deux pôles contradictoires qui freinent le développement de l’identité marocaine. Il serait judicieux que l’école et les parents apprennent à l’enfant à être civilisé conformément à sa religion et à sa culture marocaine.
3- la violence
Les enfants marocains sont exposés à des maltraitances, verbales, morales et physiques aussi bien à l’école qu’à la maison. Cette violence perturbe le développement de son cerveau et crée le circuit cérébral de l’insécurité.
L’esprit marocain ne connaît qu’un seul circuit pour percevoir et exprimer ses sentiments : « le circuit de la violence ». Ainsi il est donc violent envers lui-même, envers les autres et envers sa société.
4- Compétition et comparaison
Le système scolaire et parental enseigne à l’enfant le mécanisme de la compétition : « Il faut écraser les autres » et l’outil de comparaison : « Regarde ton cousin et le fils du voisin, sont plus forts et meilleurs que toi » (chouf s’yad’k’). L’école n’adopte pas « le travail de groupe » et le résultat évalué est non celui de « travail de groupe » mais plutôt celui du « travail individuel » d’où le développement du sens de l’individualité « moi d’abord et au diable les autres ».
5- Juger les autres
Notre société fonctionne selon une culture du jugement, héritage des faux enseignements de la religion. Parmi les dualités utilisées, on retrouve «halal (permis)- haram(interdit)» et «l’enfer-paradis», et ainsi chacun juge facilement l’autre : « celui-là ne jeûne pas, il entrera en enfer », «celui-là ne prie pas, il est un mauvais croyant ». Ce mode de pensée se reflète clairement sur Facebook.
6- L’absence des deux principes fondamentaux « le respect et la coexistence »
Le principe du «respect» est totalement absent de notre éducation, que ce soit à l’école ou à la maison. Le respect n’est pas seulement « bonjour, s’il vous plaît, merci, au revoir ». Le respect, c’est accepter l’opinion, les choix et le comportement d’autrui et ne pas essayer de le juger de quelque manière que ce soit. Le respect est l’acte de se concentrer sur soi afin d’avancer et de se détacher des autres, chaque individu est responsable de lui-même. Il est clair que le respect engendre naturellement la coexistence, et son absence laisse place à l’intolérance et à la distribution des jugements.
*Docteur Jaouad Mabrouki est Psychiatre, Psychanalyste
N/B : Les idées exprimées dans cette chronique n’étagent que leur auteur.
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