Par Mahtat Rekas *
La décision du gouvernement Akhannouch d’interrompre le processus électoral au sein du Conseil national de la presse, et de mettre en place une semblant de commission provisoire pour gérer les affaires du secteur de la presse et de l’édition, constitue une atteinte à l’image du Maroc et aux acquis démocratiques qu’il a accumulés depuis des années.
Certains essaient de nous faire croire que la polémique qui agite actuellement la presse nationale, n’est qu’une simple querelle à l’intérieur d’un corps professionnel. Mais en réalité, il s’agit bien d’une crise sérieuse qui remet en question la pratique démocratique et les respect des principes de l’État de droit et des institutions.
Le CNP est un instance d’autorégulation du secteur de la presse créée par une loi, après des années de militantisme et des professionnels et des organisations représentatives. Le mandat du premier conseil, élu en 2018, est arrivé à échéance en 2022. La logique impose que de nouvelles élections soient organisées pour former le nouveau conseil, de manière à ce qu’on garantisse le respect des lois du pays, et qu’on évite une éventuelle guéguerre au sein de la profession.
+ Maintenant, c’est aux parlementaires d’agir afin de défendre l’État de droit +
Mais à l’approche de la fin du mandat, certains professionnels, mais aussi des non-professionnels, ont surgi pour exprimer leur désir que les membres du Conseil ne soient plus élus, mais désignés. On a assité alors à une campagne visant à enterrer le principe d’élection, et des lobbies aux motivations diverses se sont alliés pour arriver à cet objectif commun. Ces intentions et ces manigances ont été confirmées et révélées aux grands jours avec la décision du ministre de se ranger du côté de ces lobbies pour violer la loi et avorter le processus électoral.
Il est possible bien sûr de modifier les lois encadrant la profession et même les statuts du CNP lui-même, mais cela ne peut en aucun cas justifier la violation des pratiques démocratiques. D’ailleurs pourquoi le gouvernement n’a pas présenté ses projets d’amendements plus tôt, et a attendu toutes ces années et la fin du mandat du Conseil, pour alerter sur l’urgence de la révision des lois.
D’autant plus que des organisations professionnelles ont prévenu le ministre l’été dernier, et celui-ci aurait pu appliquer les procédures prévues pour trouver une solution et éviter l’impasse actuelle. Les arguments avancés par le ministre -qui a fait preuve de partialité dans ce dossier, faut-il le souligner- ne tiennent pas devant la logique de la loi.
Tous ces événements montrent que le vrai objectif était d’enterrer les élections, afin de permettre aux copains du ministre de trouver une place dans le conseil, alors que les bases et les électeurs ne veulent plus d’eux.
Le reste n’étant qu’une succession de manœuvres pour imposer le fait accompli. Ces tentatives ne sont pas nouvelles, et ceux qui les mènent ont essayé une première fois en essayant d’induire en erreur les groupes parlementaires mais cela n’a pas marché. Cette fois-ci, ils ont essayé avec le Conseil du gouvernement.
Par ailleurs, la polémique autour de la distribution de la subvention de l’État à la presse et n’est qu’une stratégie des visant à détourner l’attention des manigances qui se préparent contre la profession.
Désormais, la balle est dans le camp des parlementaires qui doivent agir pour défendre l’État de droit et arrêter cette mascarade gouvernementale, avant que le Cour constitutionnelle n’intervienne pour le faire.
Et à ceux qui soutiennent l’initiative du ministre, je vous dis: ressaisissez-vous !
* Mahtat Rakas, vétéran journaliste et Directeur de publication d’Al Bayane en langue arabe
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