Droits Humains – Mme Bouayach: « Dans la lutte pour les droits de l’Homme, les voix du Sud n’ont jamais failli ni composé » (Vidéo)

Ce mardi 21 mars, lors de son intervention au 3ème Forum international des droits de l’homme à Buenos Aires, Amina Bouayach présidente du CNDH a souligné que ce “Forum est l’occasion de débattre sans hostilité ni préjugé, mais aussi de renforcer nos capacités collectives afin de mieux répondre aux défis qui guettent nos sociétés”.

Voici l’intervention intégrale de Mme Bouayach:

“Permettez-moi de prononcer cette brève intervention en langue espagnole, en hommage à nos collègues qui nous accueillent aujourd’hui à Buenos aires C’est un réel plaisir de prendre part à cette troisième édition du Forum mondial des droits de l’Homme, qui s’inscrit dans la continuité de celui de Brasilia et celui de Marrakech ; une initiative des pays du Sud qui ont décidé de se rencontrer pour partager leurs expériences, uniques et considérables, en matière de démocratie et de droits de l’Homme.

C’est également un bonheur ineffable, pour la militante que je suis, de voir de Rabat hier ,à Buenos aires aujourd’hui, et demain sous d’autres cieux, notre inébranlable détermination pour faire prévaloir, par la parole et par l’acte, les valeur des droits de l’Homme, dont l’universalité nous impose, au quotidien, un combat qui ne tolère ni complaisance, ni surenchère, qu’elle soit idéologique ou politique.

Œuvrer pour la permanence et la prééminence des droits, chers collègues, m’amène à partager avec vous quelques réflexions essentielles à mes yeux.

Mais d’abord, voudrais-je préciser que ces réflexions partent d’un prérequis , la conviction, que j’ai souligné à Rabat et que je réitère aujourd’hui : Dans la lutte pour les droits l’Homme, les voix du Sud n’ont jamais failli ni composé. Elles étaient et restent visibles, audibles et intransigeantes pour la protection et la promotion de l’idéal qui nous anime tous : celui de la préservation de la dignité humaine .

Lors de la première discussion pour la tenue du pré-forum à Rabat organisé il y a juste un mois au Royaume du Maroc, avec CIPDH-UNESCO, dont je tiens à saluer l’engagement, notre dessein était d’en faire un événement qui conjuguerait la pluralité des participants et la teneur des échanges pour consolider le processus du Forum Mondial des droits de l’Homme.

Le Pré-Forum de Rabat a rassemblé, ces voix qui font des droits de l’Homme, une éthique et un engagement permanent. Il a vu la participation de 500 participants venant de plus de 50 pays et une présence remarquée de défenseurs des droits de l’Homme, experts et autres, et au cours duquel nous avons discuté des défis transnationaux et des menaces mondiales émergentes liées en particulier à Trois thèmes : la justice transitionnelle et la mémoire, la migration, et le changement climatique, thèmes sur lesquels le Maroc peut se targuer d’une solide et unique expérience.

Les travaux menés ont permis d’enrichir les débats autour de l’effectivité des droits et d’identifier des initiatives efficientes et concrètes orientées vers l’action commune. Plusieurs recommandations ont été formulées qui ne manqueront pas d’ajouter à ce forum ,auquel nous prenons part aujourd’hui.

Plus important, le Pré-forum a concrétisé la volonté partagée de faire entendre les voix du Sud : la voix de l’Afrique, la voix de l’Amérique latine, de l’Asie, des pays insulaires, et j’en passe.

​En somme, le Pre-Forum a représenté une sorte de retraite des défenseurs des droits de l’Homme, qui demeure, de notre avis, nécessaire au renouvellement permanent des débats autour des droits et dicté par l’actualité et les métamorphoses que vit notre monde.

Je vous invite, mesdames et messieurs, à consulter les Actes qui récapitulent en détail les travaux, soit sur le site du Préforum de Rabat, partagé avec celui de nos collègues de CIPDH, ou en version papier, que mes collègues mettent à votre disposition.

En tant que défenseure marocaine des droits de l’Homme, je suis pleinement consciente de l’importance de la diversité des parcours pour les droits et la dignité.

Consciente aussi, en tant que nations du Sud, de la spécificité que nous partageons malgré la distance et la différence de langue : un passé lourd, que ce soit celui d’anciennes colonies, ou d’un passé de violations graves des droits de l’Homme ; mais un passé, lourd aussi d’accomplissements et de succès malgré des obstacles et des difficultés extrêmes.

Tous ces passés, nourrissent nos parcours exceptionnels et nos contributions considérables aux acquis universels des droits de l’Homme. C’est ainsi que j’appelle, ici à Buenos Aires, à inscrire le Forum Mondial des droits de l’Homme dans une dynamique basée sur nos complémentarités. Le Forum mondial serait notre rendez-vous d’échange autour des bonnes pratiques susceptibles d’enrichir nos stratégies multilatérales et actions partagées.

Permettez-moi, à cet effet, de rappeler l’expérience de l’ONU, qui a mis en place un système de transfert de compétences et de connaissances entre les différentes équipes en charge de l’organisation des conférences climatiques annuelles (COP). Ce système permet aux organisateurs de bénéficier des bonnes pratiques, des leçons apprises et des réseaux des éditions précédentes, tout en adaptant l’événement aux nouveaux enjeux .

Au CNDH, Conseil National des droits de l’Homme du Royaume du Maroc, nous considérons, que le Forum mondial est l’occasion de débattre sans hostilité ni préjugé, mais aussi de renforcer nos capacités collectives afin de mieux répondre aux défis qui guettent nos sociétés, et de mieux affronter un monde de plus en plus divisé dans lequel nos compatriotes, à cause de leur appartenance, sont constamment l’objet de discrimination, d’injustice et d’atteinte à leur dignité. Nos sociétés méritent de choisir, d‘exprimer et d’agir et nous devons au mieux les accompagner.

​Je réitère le message que j’avais partagé à Rabat : la tenue du Préforum, n’est pas seulement la conséquence de notre profonde conviction en l’universalité et l’indivisibilité des droits de l’Homme. Mais elle est dictée d’abord par un devoir. Celui d’unir nos voix afin d’en faire une seule, celle de la dignité, de la justice et de l’égalité.”

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