Par Ali Bouzerda
Guillaume Musso disait : « Quand vous passez l’essentiel de la journée à divaguer dans un monde imaginaire, il n’est parfois pas évident de faire le chemin dans l’autre sens… ». Cette sagesse nous rappelle les récentes divagations du chef de l’État algérien Abdelmajid Tebboune lors de son entretien avec le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken, le 30 mars à Alger.
L’enregistrement audio de cette rencontre en tête-à-tête (Tebboune – Blinken), supposée « confidentielle », a été « fuité » sur les réseaux sociaux afin de rappeler à qui veut l’écouter que l’Algérie a toujours été la pauvre brebis et le Maroc le méchant loup. Un loup avide « d’expansionnisme », selon les termes et la vision imaginaire du locataire du palais de la Mouradia.
Cet enregistrement de 26 minutes, dont l’authenticité est difficile à vérifier mais dont le contenu correspond au “narratif officiel” habituel, nous ramène aux années 60 du siècle dernier et plus précisément à la « Guerre des Sables » de 1963. Un incident frontalier dont trois générations d’algériens et de marocains ne se rappellent plus – – pour ne pas dire ne connaissent pas – -, mais que les septuagénaires de l’Establishment algérien, civiles et militaires, refusent d’oublier et l’instrumentalisent à chaque occasion pour montrer du doigt le Maroc. Un petit détail: Tebboune, et son ami le chef d’état-major de l’armée, Saïd Chengriha, sont tous deux âgés de 76 ans et ont une mémoire d’éléphant quand il s’agit de près ou de loin du voisin de l’Ouest. Mais malheureusement, ils sont amnésiques quand il s’agit des sacrifices, de la solidarité, du soutien moral et matériel du peuple marocain apportés à ses frères algériens lors de la guerre d’Indépendance (1954 – 1962).
Passons… l’Histoire jugera.
Toutefois et sans accorder une attention au reste de la « charabia désolante et pathétique du président Tebboune », comme l’a bien décrite un ami, notamment sur la question du Sahara et la fermeture des frontières entre les deux pays. Par ailleurs, un constat s’impose : « l’horloge » des politiques de nos voisins de l’Est s’est arrêtée à cette triste station de 1963, en d’autres termes: un « Back to the future » récurrent chez les dinosaures…au lieu de tourner la page et regarder vers l’avenir au moment où un nouvel ordre mondial est en train de voir le jour. Un monde où seule l’unité, et non la division, fait la force. La crise ukrainienne en est l’illustration et la leçon à en tirer pour nos autres pays du Sud.
Enfin, un bref rappel pourrait rafraîchir sans nul doute la mémoire du président Tebboune et celle des vieux militaires algériens qui ont toujours une dent contre le Maroc à propos de cette tragédie de la « Guerre des Sables » initiée et provoquée par eux, sans en calculer les conséquences:
« Le mardi 8 octobre 1963, l’armée algérienne attaque un détachement des Forces armées royales au lieu-dit Hassi Beïda, non loin de Colomb-Béchar (aujourd’hui, Béchar). Des soldats marocains sont tués…Très vite, les affrontements s’étendent à la région de Tindouf et de Figuig. La « guerre des Sables » a commencé. Elle va durer près de trois semaines.
Il existe depuis longtemps un contentieux territorial à propos des régions du Sud rattachées à l’Algérie par le colonisateur français. En janvier 1957, celui-ci met au point un projet d’Organisation commune des régions du sud de l’Algérie, dont l’objectif est de faire du Sahara algérien une entité autonome de l’Algérie.
Les Français proposent même aux Marocains, qui ont accédé à l’indépendance l’année précédente (1956), d’en exploiter conjointement les immenses ressources (fer et autres). Or, non seulement les Marocains refusent la proposition, mais ils en informent leurs frères Algériens. En juillet, le roi Hassan II et Ferhat Abbas, le président du Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA), reconnaissent l’existence d’un contentieux territorial et conviennent d’en différer l’examen jusqu’à l’indépendance de l’Algérie. Celle-ci survient en 1962. Très vite, le GPRA est balayé par l’armée des frontières et Ahmed Ben Bella s’empare du pouvoir. Pour lui, pas question d’examiner un quelconque différend, le territoire algérien étant « un et indivisible ». (Archives de Jeune Afrique)
En bref, les présidents Ben Bella, Boumédiène et Bouteflika ont adopté la même attitude vis-à-vis des revendications marocaines sur les territoires de l’Est que les colons français lui ont arrachés (durant le Protectorat) et rattachés au voisin algérien qui était considéré à l’époque comme un département français (Algérie française).
Le président Tebboune semble avoir un trou de mémoire avec l’âge et les temps difficiles que son pays traverse… En fait, et s’il s’attelait à s’occuper de ses oignons au lieu de raconter des histoires à dormir debout à l’envoyé américain? D’ailleurs, ce dernier l’a écouté avec un oreille distraite car ce qui l’intéressait en premier lieu c’est la relation d’Alger avec Poutine et non la « Guerre des Sables ». Une guerre que l’Algérie a perdue… et qui remonte à un temps où Blinken était encore dans les langes car ce dernier est né le 16 avril 1962.
Pauvre Tebboune, les temps ont changé mais lui continue à radoter…