Par Ali Bouzerda
Le soir du 17 mai 2021, des milliers et non quelques dizaines de jeunes marocains se sont jetés à la mer à leurs risques et périls afin d’atteindre « l’Eldorado » de Ceuta.
Ces jeunes ont été attirés par les lumières scintillantes et éblouissantes de cette ville – – sous colonisation espagnole depuis le XVIème siècle – -, et un jour, l’occasion se présenta pour une aventure collective, ils étaient motivés, semble-t-il, par ce dicton berbère : « Si la mort devait arriver, en groupe elle serait une partie de plaisir ».
Une parenthèse : dans le tumulte des vagues de la Méditerranée, les dirigeants européens (solidaires avec l’Espagne contre leur voisin Nord-Africain ) auraient, sans nul doute, capté 5/5 un message suite à l’incident de Ceuta. Le message en question consiste à leur rappeler que le Royaume du Maroc est bel et bien un partenaire stratégique qui aspire à un « soutien politique » sur des affaires cruciales comme la question du Sahara, et non sur une question de « sous » dont le but serait de jouer en contrepartie le rôle du « gendarme du Détroit de Gibraltar ».
Revenons à nos moutons : la question qui se pose suite à cet incident, notamment pour les familles marocaines : pourquoi ces jeunes aventuriers, dès que l’occasion s’est présentée, ont-ils abandonné leurs familles, amis, écoles et par dessus tout leur patrie ?
« Pourquoi ces jeunes ont-ils brûlé les ponts derrière eux? Et pour quelle raison? », s’interroge une veuve quinquagénaire au micro du site électronique Tétouan Press.
Indignée, cette pauvre femme en colère lâche la réponse que certains hommes politiques éviteraient dans de pareilles circonstances, en se cachant derrière une langue de bois que les jeunes considèrent comme « une insulte » à leur intelligence.
« Le chômage, le chômage, le chômage, le chômage… qui oserait s’aventurer en se jetant à la mer, certains avec un bébé, d’autres avec deux bébés, et ce, afin d’accéder à Sebta… ont-ils d’autres alternatives ? », s’indigne cette tétouania entourée d’une dizaine de jeunes qui ne cachent pas leur chagrin et leur révolte face à ce triste incident.
Du jamais vu dans cette région magnifique du bassin sud de la Méditerranée.
S’adressant à qui de droit, à commencer par le gouvernement El Othmani, un gouvernement sous la direction sans boussole des islamistes du PJD depuis une décennie; la veuve habillée en noir et qu’on croyait ignorante des lois du marché, a mis le doigt sur la plaie : « Ces jeunes sont marginalisés… il faut trouver une solution… une alternative… il ne faut pas qu’ils se perdent… ».
Ce n’est pas sorcier, l’alternative : c’est le travail…
Tout a été dit ou presque. Bien évidemment, sa colère ne concerne pas que le chômage et la migration clandestine… il y a la violence et la criminalité en milieu urbain, l’indifférence des jeunes par rapport à la chose publique, etc…
L’incident de Ceuta est certes passager, mais le vrai problème qui ne disparaîtra pas du jour au lendemain, c’est celui du chômage de ces jeunes.
Au Maroc, la croissance économique est incapable d’absorber les centaines de milliers de demandeurs d’emplois chaque année, surtout en milieu urbain. Les rhétoriques et les polémiques des politiciens, en 2021, toutes tendances confondues, est à des années lumières des rêves de la jeunesse marocaine. Notre jeunesse passe son temps à naviguer sur le Net en regardant ailleurs à la recherche d’une échappatoire, d’une alternative car « la boulitique », comme disaient nos grands parents, « ne remplit pas le panier de la ménagère ni malheureusement offre du travail au chômeur du coin».
N’est-il pas temps pour notre classe politique de se mettre sérieusement au travail afin de trouver des solutions innovantes loin de la réthorique classique, en commençant par intéresser les jeunes à ce qui se passe chez eux, au lieu de les laisser regarder ailleurs et de prendre des vessies pour des lanternes?
À bon entendeur salut!