Dans une lettre ouverte, publiée mercredi, l’ancien résistant et l’un des leaders de la gauche marocaine, Mohamed Bensaid Ait Idder, a abordé un certains nombre de thématiques, notamment la situation nationale dans la conjoncture actuelle caractérisée par la pandémie du Covid-19, tout en appelant, au niveau maghrébin, au « dépassement des conflits artificiels » dont le différend régional sur le Sahara marocain.
Extraits :
Concernant la situation au Maghreb
« Pour ce qui est de l’espace maghrébin, je réitère mes appels, qui ont rencontré des initiatives et des appels de nombreuses institutions, fora, coalitions et personnalités, à saisir les opportunités qui s’offrent à nous pour construire l’espace maghrébin intégré, coopérant et solidaire dans l’intérêt des peuples et de l’avenir de leurs jeunes générations et pour tourner la page des différends et des conflits artificiels », a écrit Bensaid en allusion claire au conflit sur le Sahara, vieux de plus de quatre décennies à cause de l’entêtement des dirigeants algériens.
Et d’ajouter: « Et comme les peuples intelligents se relèvent de leurs tragédies et tirent généralement profit de leurs blessures pour jeter les bases d’un horizon large et prometteur pour eux-mêmes et pour leur voisinage, nos peuples du Maghreb doivent bien se préparer à faire face collectivement aux répercussions de la pandémie du coronavirus qui seront dures et destructrices des conditions d’une vie digne et des piliers de l’indépendance nationale, si les efforts ne sont pas conjugués à tous les niveaux, officiel et non officiel ».
« C’est de la responsabilité des élites maghrébines conscientes et militantes, des partis progressistes et démocratiques et des instances de la société civile -attachés aux intérêts de leurs peuples- de créer des formules de coopération, de coordination et de dynamisme efficace et effectif en vue de reconstruire l’espace maghrébin commun et prometteur sur la base de la citoyenneté et de la valorisation de la diversité régionale, linguistique, religieuse et ethnique, une diversité qui enrichit et sert l’avenir ».
« A l’approche du mois de Ramadan, c’est une occasion pour appeler nos concitoyens et concitoyennes des différentes couches aisées à assumer leurs responsabilités »
« Au niveau de ma chère patrie, la lutte contre l’épidémie avec les mesures proactives appréciées, la mobilisation nationale que nous voulons qu’elle soit forte et croissante, et notre entrée dans une deuxième phase de confinement sanitaire, coïncident avec l’avènement du mois sacré de Ramadan. C’est l’occasion d’appeler nos concitoyennes et nos concitoyens des différentes couches aisées à assumer leurs responsabilités et à multiplier les initiatives de compassion, d’affection et de solidarité sociale envers les couches démunies et vulnérables -déjà victimes d’injustice- dont les conditions ont été aggravées et le seront encore plus à cause de cette situation.
Si l’État fait une partie de son devoir envers ces couches, et devra fournir encore plus d’efforts, les citoyennes et les citoyens sont tenus de faire preuve de solidarité, de prêter attention à leurs voisins, à leurs proches et à leur environnement social en entreprenant des initiatives efficaces, durables et d’accompagnement des conditions des personnes.
Car c’est dans de telles crises que les valeurs des peuples apparaissent au grand jour. Et c’est de leurs tragédies et épreuves que naissent les belles initiatives sociales que l’histoire évoquera avec fierté. Le peuple marocain et les peuples maghrébins sont tous capables de donner des leçons éloquentes et des exemples aux autres, tout comme nous l’avons enregistré au cours de nombreuses étapes de l’histoire.
Il est certain que l’accomplissement par les citoyennes et les citoyens de leurs devoirs sociaux et de solidarité n’occulte pas les responsabilités de l’État, ni ne le dispense d’assumer ses responsabilité dans la gestion de la situation par des mesures pratiques en exploitant avec intelligence sociale le climat de mobilisation nationale pour répondre aux nombreux appels nationaux, dont je me réjouis, à une véritable ouverture politique et à l’avènement d’un nouveau contrat national prometteur.
Dans le cadre des mesures souhaitées, nous espérons que le gouvernement profite de la révision de la loi de finances pour réutiliser (les ressources disponibles de la gestion rationnelle, et de l’annulation des budgets additionnels de cette année destinés aux armements, ou de se passer des budgets des superflus non primordiaux pour le fonctionnement normal de l’administration et des revenus de l’effort de solidarité nationale) pour réutiliser tout cela dans le soutien social nécessaire et juste, et pour renforcer budget du secteur de la santé publique vers lequel tout le pays s’est tourné aujourd’hui et promouvoir la généralisation d’un enseignement public de qualité, deux secteurs dont cette crise a montré pour les nations l’importance d’un investissement continu et à long terme.
Comme notre pays a lancé le chantier de réflexion sur un nouveau modèle de développement, cette pandémie a changé toutes les équations. Elle a contraint le monde entier à reconsidérer ses priorités, et plus encore donc pour ce qui nous concerne. Ainsi, il est nécessaire d’élaborer un modèle de développement alternatif qui vise à restaurer la confiance entre l’État et la société et à orienter les projets futurs pour servir l’Homme en premier. Il s’agit de d’élargissement des libertés, de la fidélité aux principes de liberté, de dignité et de la justice sociale et territoriale auxquels tiennent nos jeunes.
Je suis sûr que ma chère patrie pourra inévitablement être en mesure de surmonter cette circonstance, et en sortir encore avec une cohésion plus forte, si les volontés nationales véritables convergent pour rétablir la confiance et bâtir une nation qui fait place à toutes filles et ses fils ».
Article19.ma