Par Mohammed Ennaji
Défendre l’islam aujourd’hui n’est pas un pur acte de foi, mais une prise de conscience lucide et responsable de sa place et de son rôle dans nos sociétés au-delà de la sphère religieuse. C’est une vision qui peut conduire au progrès et non pas systématiquement à la régression. Je défends l’islam contre ceux qui le haïssent gratuitement. Je le défends contre ceux qui l’attaquent délibérément. Cette haine est une mode à laquelle s’adonnent ceux qui ne connaissent ni cette religion ni les ressorts profonds de la modernité. En Europe, le christianisme a joué un rôle essentiel par de multiples biais dans la mise en place des conditions favorables à l’expansion économique à laquelle il a du s’adapter. Ce ne sont pas les pères de l’Eglise qui le disent mais des historiens sérieux proches du marxisme.
Aujourd’hui alors que je me construis en tant qu’identité, l’islam est le ciment qui unit et le relais qui peut contribuer, à sa façon, à propager dans la société la nécessité d’un réveil, la nécessité dans celui-ci d’une éthique. Il n’y en a pas d’autres de la même puissance présentement, en dehors de discours creux qui n’ont de moderne que l’apparence.
Les groupes dominants chez nous n’ont pas de religion, ils n’ont en embrassé qu’une seule et unique : celle de leurs intérêts. Pourtant personne ne profite mieux qu’eux du discours religieux instrumentalisé en vue de consolider leur hégémonie.
Je ne suis pas pratiquant, loin de là, mais je suis profondément attaché à ma culture musulmane et en respecte les fidèles. Aujourd’hui il n’est pas question pour moi de prêcher sur les rituels qui rapportent beaucoup d’argent aux Saoudiens, mais de mieux faire prendre conscience de la puissance mobilisatrice d’une culture en vue du progrès.
Ma posture me permet en outre de critiquer légitimement, de rediscuter ce qui relève de l’indiscuté pour la croyant, de féconder ainsi ma culture. Je suis un critique légitime des aspects désuets d’une culture dont je suis un adepte. Je tends la main aux Musulmans qui ont envie de ne pas rater le train de l’histoire.
Tous ceux qui tournent complètement le dos au religieux en lui collant tous les maux sans en mesurer les acquis décisifs, ne feront que du surplace, la modernité restera un pur fantasme dans leur tête.