Parlons cash!

Dans un peu moins d’un mois, il y aura des élections qui concernent l’arrondissement, la municipalité, la région et notre vie quotidienne. L’Etat a décidé de rouvrir l’inscription aux listes électorales jusqu’au 20 août. Il y a quatre millions de Marocains qui ne sont même pas inscrits sur les listes électorales. Selon les services concernés, c’est une information et non une spéculation, le taux de participation dans les grandes villes ne dépasserait guère  les 15%.
Je rappelle juste que le PJD dirige le gouvernement avec 1,2 million de voix. C’est-à-dire que si les non-inscrits voulaient se donner la peine, ils changeraient le paysage.
J’ai mon propre engagement et je ne suis pas en campagne électorale avant l’heure. Mais enfin, il faut savoir ce que l’on veut et l’assumer. Bien évidemment que le champ partisan, l’offre politique n’est pas très alléchante. Je ne peux me permettre d’affirmer le contraire par respect pour mes lecteurs. Mais c’est un cercle vicieux dont nous ne sortirons jamais sans l’engagement de tous.
Parlons cash! On veut une véritable démocratie, la monarchie parlementaire, la souveraineté populaire. La nouvelle Constitution devait, ne doit être qu’une étape pour cet objectif. On en est très loin. Dé-crédibilisées, les institutions représentatives ne peuvent pas jouer leurs rôles. L’institution monarchique, forte de sa légitimité historique et populaire occupe tout l’espace.
 
Ce n’est pas une question de choix du monarque, mais le résultat d’une situation où les autres acteurs étant en déconfiture, c’est le palais qui mène, ce qui semble être, le projet national, y compris dans les moindres détails.
Quand le discours Royal annonce que le ministère de l’Intérieur a un projet pour 23000 douars, ce n’est pas une bonne nouvelle pour la démocratie locale, cela ne va pas dans le sens de la monarchie parlementaire. Sauf que ce pays a besoin d’une véritable stratégie de solidarité territoriale, et qu’à part les slogans, aucun parti n’avance la moindre idée.
Le paradoxe, c’est que ce sont ceux-là mêmes qui rêvent de la consécration de la légitimité populaire qui ne votent pas ou qui ne sont mêmes pas inscrits. Le résultat on le connaît, les islamistes ont leur socle, les acheteurs de voix font leur marché, les autres font comme ils peuvent. 

Les partis politiques sont médiocres? Qui vous empêche de les intégrer, de tenter de les changer, d’en créer de nouveaux ?
Parlons cash! Au soir du 5 septembre, nous aurons des collectivités locales élues par ceux qui auront voté. Si les voieries sont en déperdition, qu’il n’y a pas de crèche dans votre quartier, que les services publics sont sinistres, vous en serez responsables, parce que vous n’aurez pas voté.
La citoyenneté est incompatible avec la position de commentateur. Parce que je n’ai qu’un pays, que c’est le mien, je m’implique, tout en sachant qu’on est loin de la Suède. 
Maintenant si vous êtes pour la révolution, faites-la, mais je vous préviens, c’est un peu plus compliqué que de regarder la télé et de dire que tout ça c’est de la connerie.
Par Jamal Berraoui , Libération (Maroc)
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