Polémique – 120 scientifiques dénoncent la manipulation génétique de deux jumelles chinoises (Reuters)

Ce sont 120 scientifiques, pour la plupart chinois, qui se sont insurgés après l’annonce par un de leurs collègues chinois qu’il était intervenu sur les gènes de deux jumelles pour en faire les premiers bébés génétiquement modifiés, selon l’agence Reuters.

Dans une lettre ouverte mise en ligne, ces scientifiques estiment que l’utilisation de la technologie d’édition Crispr-Cas9 est risquée et injustifiée et qu’elle porte atteinte à la réputation ainsi qu’au bon développement de la communauté biomédicale chinoise, ajoute la même source.

Dans des vidéos postées sur internet, le scientifique He Jiankui défend ce qu’il affirme avoir accompli, à savoir l’édition génétique des embryons, pour prévenir chez deux bébés nés ce mois-ci toute future infection au VIH, le virus qui provoque le sida.

Les scientifiques estiment dans leur lettre ouverte, que publie le site d’informations chinois The Paper, que « mener des expériences directement sur les humains ne peut être qualifié que de fou ».

« La boîte de Pandore a été ouverte. Nous pouvons encore timidement espérer la refermer avant qu’il ne soit trop tard », disent les quelque 120 scientifiques dans leur lettre rédigée en chinois.

Yang Zhengang, professeur à l’université Fudan, a dit à Reuters avoir signé la lettre parce que l’édition génétique est, à ses yeux, « très dangereuse ».

Intervention attendue à Hong Kong
He Jiankui doit prendre la parole mercredi lors d’un sommet international sur l’édition génomique humaine qui se tiendra à l’université de Hong Kong.

L’Université des sciences et technologies du sud de la Chine (SUSTC) à Shenzhen, où He Jiankui est professeur associé, dit ne pas avoir été mise au courant du projet de recherches de celui-ci, qui est en congés et n’est plus rémunéré depuis février.

La commission nationale de santé chinoise s’est déclarée lundi « vivement préoccupée » et a demandé aux autorités sanitaires provinciales d’« enquêter immédiatement et de faire la lumière sur l’affaire ».

Quant à la Société de génétique de Chine et la Société chinoise de recherche sur les cellules souches, elles ont déclaré dans un communiqué commun que He avait agi « à titre individuel » et estimé que ses travaux présentaient « des risques énormes pour la sécurité dans les sujets faisant l’objet de recherches ».

« Nous pensons que les recherches effectuées par He contreviennent sérieusement aux réglementations chinoises et au consensus trouvé par la communauté scientifique internationale », ont déclaré ces deux organisations.

La technologie génomique

Crispr-Cas9 est une technologie qui permet aux scientifiques de couper la séquence ADN et de modifier le gène CCRS en insérant une nouvelle séquence – ce qui permet d’espérer guérir des maladies par la thérapie génique, mais ce qui suscite des interrogations quant à l’éthique et à la sécurité.

La commission d’éthique médicale gouvernementale de la ville de Shenzhen, dans le sud de la Chine, a déclaré enquêter sur cette affaire, tout comme la commission sanitaire de la province du Guangdong.

Quant au comité organisateur de la conférence de Hong Kong où He doit s’exprimer, il a déclaré lundi avoir été seulement informé maintenant des travaux du scientifique sur le génome des deux petites jumelles. « Notre objectif est de contribuer à la poursuite de recherches responsables sur l’édition du génome humain », explique le comité organisateur. (Reuters)

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